Nos vies sont presque toutes les mêmes
du prêt à porter plus ou moins bien taillé
un tissu qui rétrécie au premier lavage
et étrique nos âmes
nous donne des faux plis sur la gueule
des rides soucieuses
un petit air d’abandon qu’on se trimbale
On a tellement besoin d’air
qu’on aime suspendre nos destins
sur les fils tendus le long de la maison
pour que nos vies claquent au vent
et sèchent au soleil
quand elles ont été trop longtemps frappées
dans le tambour de la machine
à laver
On rêvait pourtant de haute couture
de sur mesure
d’être beau et élégant dans les années qui passent
rugir comme le feu
songer comme la lune
caresser l’amour comme l’eau flirte avec les pierres rondes du ruisseau.
On cherchait seulement un peu de tendresse
ces mêmes caresses qu’on donne aux chiens
ces mots doux qu’une mère susurre au dessus du berceau
mais les robes de princesse et les habits de prince
ne sont plus que des déguisements pour les grandes occasions
on traîne nos culs dans du mauvais coton
et nos bras sont devenus si musclés
au fil des batailles qu’il a fallu mener
Tes yeux sont un peu délavés
tu as trop abusé des larmes
car maintenant je vois ton cœur dans tes pupilles
je te vois dans ta robe de princesse
mais je n’ai pas de cheval blanc
juste ce vieux bus
qui nous emmènera quand même.